Vol à la tâche : attention à cette arnaque sournoise qui vise de plus en plus de retraités
Sous des airs d’anecdote grotesque, une vague d’arnaques bien huilées s’est abattue sur la France. Une mayonnaise projetée sur le dos, un geste amical… et des bijoux qui s’évaporent. Ce n’est pas une mauvaise blague, mais la méthode redoutablement efficace d’un gang international qui ciblait les plus âgés.
Ce jour-là à Châtenay-Malabry, Serge, 75 ans, a cru avoir été victime d’un pigeon un peu maladroit. En réalité, ce qui s’était écoulé sur son dos n’était pas un excrément, mais un liquide savamment dosé, ressemblant à de la mayonnaise. Un faux accident, et bientôt, de faux secouristes. Un couple d’inconnus s’empresse de l’aider, s’affaire à essuyer la prétendue salissure… pendant que les bijoux de Serge disparaissent.
Le stratagème était aussi simple qu’invisible. Le désordre crée l’urgence, l’empathie anesthésie la méfiance, et la dextérité des voleurs fait le reste. Cette scène n’a pourtant rien d’isolé : le 22 juillet 2025, quatre membres d’un gang péruvien étaient jugés à Paris pour 12 vols similaires, perpétrés entre Montpellier, Nice et la capitale. Tous ont été réalisés sans violence, mais avec un professionnalisme glaçant.
Une mécanique criminelle familiale bien rodée
Derrière cette arnaque insolite se cache un « business » familial parfaitement structuré. Juan Carlos T. et sa belle-sœur Jessica E. sillonnaient les villes françaises avec un chauffeur complice, ciblant des seniors repérés pour leurs bijoux voyants. La mise en scène suivait un canevas précis :
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Un jet de sauce ou de mayonnaise sur les vêtements, réalisé en toute discrétion.
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Une fausse intervention « bienveillante », prétexte à un contact rapproché.
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Pendant que l’un essuie, l’autre subtilise bagues, bracelets, colliers voire montres.
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Une pierre de touche permettait d’évaluer rapidement la valeur des bijoux volés.
Le butin était ensuite dissimulé et écoulé, parfois en toute créativité. Lors de leur arrestation, les enquêteurs ont découvert plusieurs chaînes en or cachées dans un plafonnier, au domicile du receleur présumé. C’est grâce à la traçabilité des véhicules de location utilisés à Orly que la police a pu identifier et surveiller le groupe, jusqu’à leur interpellation à Paris.
Des prétextes touchants mais des actes organisés
Lors du procès, les prévenus ont tenté de faire valoir des circonstances atténuantes. Le chef présumé, père de 12 enfants, a plaidé la misère, évoquant sa fille victime de violences. Jessica E. a parlé de proches malades à soigner. Quant au chauffeur, il aurait eu besoin de financer une opération pour sa femme. Des récits humains, sincères peut-être, mais insuffisants pour émouvoir la justice.
Le parquet a vu clair dans le jeu : « Ce n’est pas une réaction désespérée, mais une entreprise criminelle », a-t-il tranché. Même sans violence physique, le traumatisme psychologique est lourd, notamment pour des victimes âgées et souvent seules. L’exploitation de leur fragilité ajoute un degré de cynisme rarement atteint.
Un verdict sévère mais symbolique
Le tribunal de Paris n’a pas pris cette affaire à la légère. Juan Carlos, Jessica et le chauffeur ont écopé de deux ans de prison ferme, leur quatrième complice de huit mois, tandis qu’une interdiction de territoire français de dix ans a été prononcée pour chacun. Le receleur, en retrait mais impliqué, s’en sort avec 12 mois avec sursis et une amende de 50 000 euros.
Derrière la légèreté apparente du « vol à la mayonnaise », se dessine un phénomène bien plus grave : une délinquance ciblée, méthodique, qui met en lumière l’extrême vulnérabilité de nos aînés. Un sourire, une tache, un bijou en moins… et une confiance envolée pour toujours.