Charges multipliées par trois : une retraitée ne « mange que des yaourts » pour payer le chauffage et va être jugée devant les tribunaux
À Toulouse, la flambée des prix de l’énergie plonge de nombreux locataires dans la précarité. À Montaudran, une retraitée se bat pour régler une facture de chauffage qui a plus que doublé en quelques mois. Son cas illustre une situation qui touche désormais des centaines de foyers en France.
Christine Derruga vit depuis 33 ans dans une résidence gérée par Toulouse Métropole Habitat. En 2023, ses charges de chauffage ont bondi de 96 à 250 euros par mois, soit une hausse de 160 %, conséquence de la fin d’un contrat à tarifs bloqués. Avec une pension de retraite de 900 euros, la sexagénaire peine à assumer cette dépense : « Même en payant 3.000 euros par an, j’ai froid », confie-t-elle. Aujourd’hui, elle doit plus de 1.000 euros au bailleur social, qui a décidé de l’assigner en justice malgré un remboursement progressif de 50 euros par mois mis en place avec son assistante sociale.
Le bailleur social se justifie
Pour Toulouse Métropole Habitat, cette situation découle directement de l’évolution du marché de l’énergie. Entre juin 2021 et juin 2023, un contrat spécifique avait permis de protéger les locataires des hausses, mais depuis son expiration, les prix se sont alignés sur ceux du marché. Résultat : 129 locataires ont vu leurs charges bondir, et 30 d’entre eux se sont retrouvés en dette en 2023. Si la majorité a pu régulariser leur situation, Christine Derruga reste la seule à ne pas avoir soldé son arriéré.
Des associations mobilisées face aux hausses
La Confédération Nationale du Logement suit de près le dossier. Jean-Louis Villinger, son responsable départemental, souligne que le problème ne se limite pas à Montaudran : « On est de plus en plus sollicités pour ce genre de cas, que ce soit avec du chauffage collectif électrique ou au gaz. » Il rappelle que la hausse des coûts touche de nombreux foyers modestes, déjà fragilisés par la baisse du pouvoir d’achat.
Une tendance nationale inquiétante
En trois ans, le prix moyen de l’électricité a grimpé de plus de 12 %, sans que les fournisseurs ne proposent encore de tarifs bloqués. Le gaz, lui, reste indexé sur le pétrole, accentuant la volatilité des factures. Selon le ministère de la Transition écologique, près de 14 % des résidences principales en France sont des passoires thermiques, aggravant la précarité énergétique.
Un combat pour la dignité
Si l’immeuble de Montaudran n’entre pas dans cette catégorie, son isolation reste insuffisante pour contenir les coûts. Pour Christine Derruga, l’enjeu dépasse la simple facture : il s’agit de continuer à vivre dignement sans avoir à choisir entre chauffage et alimentation. Son cas, aujourd’hui porté devant la justice, symbolise la détresse silencieuse de milliers de Français confrontés à une crise énergétique qui ne faiblit pas.