Présidentielle 2027 : «Je ne ferme pas la porte», prévient la ministre Aurore Bergé
Une phrase à la radio, un sourire calculé, une porte entrouverte : il n’en faut pas plus pour faire d’Aurore Bergé une candidate « putative » de plus pour 2027.
Entre opportunisme assumé, fidélités fluctuantes et instinct de survie politique, la ministre déléguée à l’Égalité entre les femmes et les hommes avance ses pions avec le sens du tempo et du signal, même symbolique. À Sud Radio, face à Jean-Jacques Bourdin, elle ne dit pas qu’elle est candidate, mais elle ne dit surtout pas qu’elle ne le sera jamais. Ce petit jeu d’ambiguïté est un classique du paysage politique français. « Je ne ferme pas la porte », confie-t-elle, en parlant d’une hypothétique primaire du « socle commun » pour 2027. Une formule connue, mais toujours efficace : elle permet d’occuper le terrain sans s’engager, de figurer sans s’exposer, de postuler sans candidature.
Et dans une Macronie post-macronienne en recomposition permanente, il faut être visible, être présent, quitte à forcer un peu la serrure.
Un parcours de fidélités évolutives
Aurore Bergé n’est pas une inconnue dans le paysage. Elle a traversé deux décennies d’engagement politique, démarrant sous la bannière UMP des Yvelines grâce à Pierre Bédier, puis sous l’aile de Valérie Pécresse. Elle aura soutenu successivement François Fillon, Nathalie Kosciusko-Morizet, Alain Juppé… avant de rallier Emmanuel Macron en 2017. Une trajectoire que d’aucuns qualifient d’opportuniste, mais qui témoigne aussi d’un flair certain pour sentir où souffle le vent.
Et si certains s’en amusent ou la critiquent pour ses fidélités à durée déterminée, l’histoire récente de la droite française montre que ces reproches sont souvent sélectifs. Alain Juppé lui-même, figure tutélaire du chiraquisme, soutenait à la fois des candidats LR et des macronistes en 2017, sans que cela ne l’empêche de rester une référence morale pour beaucoup.
Une macroniste droite dans ses bottes (sauf sur le sociétal)
Dans le paysage mouvant de la majorité présidentielle, Bergé incarne une ligne résolument à droite, à l’exception notable des sujets de société, où elle affiche des positions plus progressistes. Sur l’immigration, la sécurité, l’ordre, elle joue la fermeté, voire la frontalité. Mais elle assume aussi un féminisme militant et une défense constante des droits LGBT+, parfois en décalage avec les voix plus silencieuses de la majorité.
À l’heure où Édouard Philippe prend ses distances et où Gabriel Attal incarne un virage technocratique-populaire, Aurore Bergé choisit l’ancrage dans l’héritage macronien — quitte à en assumer les lourds passifs. Dette, tensions sociales, crise démocratique : peu s’en réclament encore, mais elle, oui. Et ce panache-là, dans ce désert de fidélités, lui vaut au moins le mérite de la cohérence.
Pourquoi pas elle ? Pourquoi pas maintenant ?
À moins de 40 ans, et avec déjà vingt ans de politique derrière elle, Aurore Bergé sait très bien que ses chances d’atteindre l’Élysée sont infimes. Mais l’essentiel n’est pas là. Comme Bruno Le Maire en 2016 — souvenez-vous de ses 2,38 % à la primaire de la droite, pour une carrière ensuite bien remplie à Bercy —, il s’agit surtout d’exister dans le paysage, de peser dans les tractations, de marquer son territoire avant la grande bataille.
Car en politique, il faut être dans le dispositif, comme le rappelle cruellement l’oubli rapide de certains battus brillants. Ceux qui ne se montrent pas sont vite effacés. Elle, elle se montre. Même au prix des moqueries, même au risque du ridicule, elle plante sa bannière sur un terrain encore mouvant.
Le jeu de la succession a commencé
La phrase de Francis Blanche dans Les Tontons flingueurs n’est pas qu’une citation savoureuse : elle décrit parfaitement l’ambiance qui règne à l’approche de 2027. Emmanuel Macron, s’il n’est pas mort politiquement, est hors-jeu constitutionnellement. L’empire est vacant, et les prétendants se bousculent aux marges : Philippe, Attal, Le Maire, Darmanin, et désormais Bergé. Chacun tente de bâtir son créneau, de rassembler un socle, d’exister dans la mêlée.