En annonçant son renoncement au 49.3 pour le budget 2026, Sébastien Lecornu tente de marquer une rupture avec ses prédécesseurs.

Une décision inédite qui replace l’Assemblée nationale au cœur du jeu, mais qui ouvre aussi une période d’incertitude politique autour de la capacité du gouvernement à gouverner sans cet outil redouté.

Sébastien Lecornu a surpris vendredi 3 octobre en déclarant qu’il n’emploierait pas l’article 49.3 pour faire adopter le projet de loi de finances. Le Premier ministre entend afficher une méthode plus parlementaire et moins autoritaire, dans un contexte où ses prédécesseurs, d’Élisabeth Borne à François Bayrou, avaient usé et abusé de cette disposition. « On ne peut pas passer en force », a insisté Lecornu, qui fait de cette posture un gage d’ouverture.

Un signal clair adressé aux oppositions

L’annonce, faite dès le matin depuis Matignon, visait à envoyer un message aux forces politiques, notamment au Parti socialiste. En renonçant à cet instrument constitutionnel, le chef du gouvernement oblige ses opposants à jouer le jeu du débat parlementaire. Marine Le Pen salue « une vraie évolution », Olivier Faure reconnaît « une méthode différente », et Fabien Roussel admet qu’« il serait raide » de censurer Lecornu dès sa première semaine. Reste que le PS juge son programme budgétaire « alarmant » et n’exclut rien pour la suite.

Des garde-fous toujours à disposition

Si le 49.3 est écarté, le gouvernement conserve d’autres leviers. L’article 40 de la Constitution empêche tout amendement créant de nouvelles dépenses, tandis que l’article 44.3 permet de recourir au vote bloqué, ne retenant que les amendements qu’il accepte. Autant de moyens qui laissent une marge de manœuvre au Premier ministre, même si leur utilisation pourrait contredire l’esprit de sa promesse. Enfin, l’article 47, jamais utilisé, autorise l’adoption par ordonnance en cas de blocage prolongé.

Une méthode risquée mais porteuse de sens

Avec ce renoncement, Sébastien Lecornu prend le risque d’être mis en minorité à chaque vote. Mais il se donne aussi une image d’homme de dialogue, cherchant à réhabiliter l’idée d’un Parlement vivant et représentatif. Pour ses adversaires, l’enjeu est désormais de savoir s’ils joueront la carte de la responsabilité ou s’ils tenteront de fragiliser rapidement un exécutif sans majorité solide.