« Les médicaments sans lien avec l’ALD ne seront plus remboursés » : que signifie cette annonce ?
L’annonce de François Bayrou sur la fin du remboursement à 100 % des médicaments sans lien direct avec les affections de longue durée (ALD) a provoqué de vives réactions.
Pourtant, dans la réalité, ces traitements ne sont déjà pas systématiquement pris en charge intégralement. Décryptage d’un système plus complexe qu’il n’y paraît. Le régime des affections de longue durée (ALD) concerne près de 14 millions de Français atteints de maladies graves ou chroniques nécessitant un suivi prolongé. Lorsqu’une pathologie est reconnue comme ALD exonérante, les soins en lien direct avec cette maladie sont remboursés à 100 %, à l’exception de la franchise médicale ou d’une participation forfaitaire de 2 euros. C’est le cas par exemple pour la maladie d’Alzheimer, certains cancers, ou le diabète de type 1.
Mais tous les soins reçus par ces patients ne sont pas couverts à ce taux. Les traitements qui n’ont aucun rapport médical direct avec la pathologie reconnue – par exemple un sirop pour la toux prescrit à un patient diabétique – sont remboursés au taux habituel (65 %, 30 % ou 15 % selon la classe du médicament).
Les subtilités de l’ordonnance « bizone »
Pour distinguer ces deux catégories, les médecins utilisent une ordonnance dite « bizone », spécifique aux patients en ALD. La partie supérieure regroupe les soins liés à l’affection, remboursés à 100 %, tandis que la partie inférieure est réservée aux traitements sans lien direct, remboursés normalement. Toutefois, dans la pratique, cette distinction est loin d’être aussi nette qu’elle n’y paraît.
De nombreux professionnels de santé et syndicats médicaux déplorent la complexité de cette ordonnance, où il est parfois difficile de trancher objectivement ce qui relève ou non de l’ALD. Comme le soulignait déjà l’ex-sénatrice Laurence Cohen en 2012, le flou médical et administratif rend les contrôles rares et peu contraignants. À l’époque, seuls 112 médecins avaient été contrôlés sur l’ensemble du territoire.
Que veut vraiment dire Bayrou ?
Lors de sa conférence du 15 juillet, François Bayrou a annoncé vouloir exclure du remboursement à 100 % les médicaments sans lien avec l’ALD, ce qui semble redondant avec le fonctionnement actuel. Cependant, l’exécutif souhaite aller plus loin en revoyant le panier de soins considérés comme efficaces et directement utiles à la pathologie.
L’objectif serait d’exclure certains traitements actuellement classés à tort comme étant en lien avec une ALD, mais dont le service médical rendu serait faible, voire nul. Une réforme qui vise à mieux cibler les remboursements dans un contexte de rigueur budgétaire, sans nécessairement baisser leur niveau pour les patients concernés… du moins en théorie.
Une réforme encore incertaine
Ces déclarations, bien que médiatisées, n’ont pour l’instant aucune portée législative. Le projet de loi du Budget 2026 n’a pas encore été soumis au vote, et il reste très incertain que cette mesure soit conservée dans sa version finale. D’ici à l’automne, de nombreuses discussions devront avoir lieu avec les parlementaires et les acteurs de la santé, qui pourraient s’opposer à une remise en cause trop brutale du dispositif ALD.
Une colère compréhensible chez les patients
Pour beaucoup de malades chroniques, l’annonce du Premier ministre a été perçue comme une menace directe à leurs soins, alors même que les soins hors ALD ne sont déjà pas pris en charge intégralement. Les réactions indignées de patients rappellent à quel point le remboursement à 100 % constitue un acquis essentiel pour les personnes souffrant de pathologies lourdes, parfois précaires et dépendantes de traitements coûteux.