Entre deuil familial, condamnations judiciaires et tensions patrimoniales, l’année 2025 s’annonce comme l’une des plus éprouvantes pour Marine Le Pen.

La disparition de son père Jean-Marie a non seulement ravivé les blessures intimes, mais a aussi révélé une succession potentiellement explosive qui menace de fracturer durablement le clan Le Pen. Le 7 janvier 2025, Marine Le Pen apprenait la mort de son père… par voie de presse. En déplacement à Mayotte ce jour-là, la cheffe de file de l’extrême droite française n’avait, semble-t-il, pas été avertie en amont. Une manière brutale d’ouvrir une année qu’elle n’oubliera pas de sitôt. Car, à peine le deuil engagé, c’est la justice qui est venue la rattraper : le 31 mars, le Tribunal correctionnel de Paris la condamnait pour détournement de fonds publics.

Déjà fragilisée politiquement, la députée RN doit désormais composer avec un contexte familial tendu, où l’héritage de Jean-Marie Le Pen — à la fois matériel et symbolique — pourrait cristalliser toutes les rancœurs.

Un testament qui change la donne

C’est Mediapart qui a levé le voile sur ce qu’il qualifie de “petite bombe” laissée par le patriarche. Le 5 août 2023, Jean-Marie Le Pen aurait rédigé un testament manuscrit d’une page, daté et signé “à l’encre bleue”, dans une écriture hésitante. Ce document inédit vient rebattre les cartes d’un héritage pourtant considéré comme réglé depuis des années.

Le plus surprenant ? L’octroi de l’usufruit de l’intégralité du patrimoine au bénéfice de son épouse, Jany Le Pen. Cela signifie que cette dernière pourra jouir de l’ensemble des biens de Jean-Marie Le Pen, dont le célèbre domaine de Montretout, sans pour autant en détenir la pleine propriété. Une décision qui contrarie fortement les projets de Marine Le Pen.

Montretout, joyau symbolique et enjeu stratégique

Située à Saint-Cloud, la demeure de Montretout est bien plus qu’un simple bien immobilier : elle incarne l’histoire du Front national et l’ascension de Jean-Marie Le Pen. Ce grand hôtel particulier avait été légué à ce dernier en 1976 par Hubert Lambert, héritier des ciments Lambert, accompagné d’une somme d’environ 30 millions de francs. Ce legs considérable fit de Jean-Marie Le Pen un homme d’influence et de fortune.

Mais aujourd’hui, cette demeure devient un verrou juridique. Selon Mediapart, Marine Le Pen aurait envisagé de vendre Montretout pour faire face à ses frais de justice et aux lourdes amendes qu’elle doit régler. Or, en vertu du testament, cette vente ne pourra avoir lieu qu’avec l’accord explicite de Jany Le Pen, usufruitière du bien.

Une guerre de succession en embuscade

Le testament posthume pourrait bien réveiller des fractures anciennes entre les filles Le Pen et leur belle-mère. Marine, Marie-Caroline et Yann Le Pen sont les trois héritières directes, mais ne pourront pas disposer librement des actifs sans l’aval de Jany. Une configuration juridique qui installe une forme de dépendance familiale… et potentiellement un bras de fer discret.

Selon Mediapart, les tensions sont déjà vives “en coulisses depuis deux ans”. Le château de Montretout, lieu de toutes les mémoires, pourrait devenir le théâtre d’un affrontement silencieux mais déterminant pour l’avenir du clan. Car derrière la question patrimoniale, c’est aussi la mémoire politique du père fondateur du FN qui se joue.

Une famille sous pression, une héritière sous surveillance

Au-delà des enjeux immobiliers, cette succession vient fragiliser un peu plus la position politique de Marine Le Pen. Déjà affaiblie par sa condamnation au printemps, elle doit désormais gérer des tensions familiales en pleine lumière, tout en poursuivant sa carrière dans une droite en recomposition.

Le Rassemblement national reste suspendu à son avenir, et certains proches, dans son entourage, redoutent que cette accumulation de chocs — judiciaires, financiers, familiaux — ne compromette durablement son autorité politique.

Vers un affrontement juridique ou une entente familiale ?

Rien ne dit encore si les sœurs Le Pen chercheront à contester le testament. Mais les conditions sont réunies pour une bataille à la fois juridique, symbolique et médiatique. La position centrale de Jany Le Pen, longtemps restée en retrait de la scène publique, devient aujourd’hui un élément de blocage — ou de conciliation — déterminant.

Dans les mois à venir, les regards se tourneront vers Montretout, non plus comme bastion historique de l’extrême droite, mais comme possible théâtre d’une nouvelle déchirure familiale. Et pour Marine Le Pen, le mot “héritage” risque de peser bien plus qu’un simple legs politique.