Annoncée comme un moteur industriel majeur pour l’Alsace, l’usine Huawei de Brumath devait symboliser l’implantation stratégique du géant chinois en Europe.

Mais cinq ans après les premières promesses, les bâtiments restent vides, aucune production n’a été lancée et l’espoir de créer 300 emplois s’est peu à peu évaporé, laissant perplexité et amertume. À Brumath, l’usine se compose de quatre bâtiments totalisant 52.000 m², un projet colossal destiné à produire des équipements 5G pour le marché européen. Pourtant, malgré la taille impressionnante du site, aucune machine ne tourne. Aucun robot, aucun technicien, aucune chaîne de production n’a été montée. Alors que les « dark factories » entièrement automatisées se multiplient en Chine, celle-ci ressemble plutôt à un chantier figé dans le temps.

Des promesses d’emplois envolées

Pour les habitants et commerçants de la ville, la déception est profonde. On leur avait annoncé 300 emplois directs, un souffle économique bienvenu dans la région. Une boulangère située à quelques centaines de mètres évoque la clientèle potentielle disparue avant même d’exister. Les riverains parlent d’une occasion manquée, d’autant que plusieurs habitants avaient espéré y trouver du travail.

Un projet entouré de silence et d’incertitudes

Les élus locaux eux-mêmes reconnaissent ne plus obtenir d’informations. Retards, absence de communication, aucune campagne de recrutement. Certains habitants racontent avoir cherché le lieu pour déposer un CV, jusqu’à entendre parler d’un conteneur supposément prévu à cet effet… sans jamais l’apercevoir. Le mystère qui entoure l’usine nourrit l’incompréhension, voire la suspicion.

Des tensions géopolitiques en toile de fond

Depuis l’annonce du projet, le contexte international a radicalement changé. L’Allemagne puis la France ont décidé de limiter, voire d’interdire l’usage des équipements Huawei, par crainte d’ingérences ou d’espionnage. Ces mesures ont fragilisé la viabilité du marché européen pour le groupe. Produire des antennes 4G et 5G pour un continent qui n’en veut plus n’a plus de sens industriel, estiment plusieurs observateurs.

Des soupçons qui pèsent lourd

La situation s’est encore complexifiée en 2024, lorsqu’une perquisition a visé le siège parisien de Huawei dans une affaire de corruption impliquant une ancienne élue régionale. À cela s’ajoutent des accusations d’espionnage relayées par certains élus d’opposition, renforçant la méfiance. La proximité du site avec un centre de renseignement militaire aurait constitué un frein décisif pour les autorités comme pour l’entreprise.