Gouvernement Lecornu : 28.000€ pour 13 heures en poste, les avantages des ministres démissionnaires provoquent un tollé
En moins d’un mois, la France vient de voir tomber un gouvernement qui devait symboliser la stabilité.
Sébastien Lecornu, nommé Premier ministre le 9 septembre 2025, a présenté sa démission ce lundi 6 octobre, plongeant Matignon dans une nouvelle zone de turbulences politiques. Retour sur une déflagration politique aussi rapide qu’inattendue.
Vingt-sept jours. C’est le temps qu’aura duré l’aventure de Sébastien Lecornu à Matignon. Dans un communiqué lapidaire, l’Élysée a confirmé que “Sébastien Lecornu a déposé sa démission auprès d’Emmanuel Macron, qui l’a acceptée”. Ce départ précipité établit un record : jamais un Premier ministre n’avait quitté ses fonctions aussi vite sous la Ve République.
Cette démission intervient dans un climat de désillusion politique. À peine la première liste des ministres dévoilée, les critiques se sont abattues sur le nouveau gouvernement, accusé de n’être qu’une reconduction déguisée de l’équipe présidentielle précédente. La promesse de “rupture” affichée par Lecornu s’est rapidement effondrée face aux nominations de fidèles macronistes.
Une équipe contestée dès sa naissance
Dès dimanche 5 octobre, le ton était donné. Plusieurs ténors de la droite modérée ont pris leurs distances avec Lecornu. Bruno Retailleau dénonçait une équipe “qui ne reflète pas la rupture promise”, tandis que Xavier Bertrand déclarait sans ambiguïté : “Les Républicains ne peuvent pas participer à ce gouvernement.”
Dans l’hémicycle, la tension montait déjà d’un cran. Sur BFMTV, le député Jean-Philippe Tanguy (RN) estimait que “la censure est une évidence”. En clair : le gouvernement Lecornu était voué à tomber avant même d’avoir pu gouverner. L’absence de majorité claire et la défiance de ses alliés ont eu raison du Premier ministre avant même son premier Conseil des ministres complet.
Une crise politique majeure s’installe à Paris
La démission de Sébastien Lecornu a ouvert une brèche inédite dans le paysage institutionnel français. En l’espace de quelques heures, la classe politique s’est enflammée, chacun y voyant un signal d’alerte sur la fin de cycle du macronisme.
Jean-Luc Mélenchon a immédiatement saisi l’occasion pour réclamer “l’examen immédiat” d’une motion de destitution du président Emmanuel Macron à l’Assemblée nationale. Soutenu par les groupes écologistes et communistes, le leader insoumis parle d’une “crise de légitimité totale”.
À droite, le vice-président des Républicains David Lisnard s’est montré tout aussi sévère : “L’intérêt de la France commande qu’Emmanuel Macron programme sa démission. La Ve République et l’avenir du pays sont en jeu.” De son côté, Jordan Bardella (RN) a appelé à une dissolution immédiate de l’Assemblée nationale, estimant que “la stabilité ne reviendra qu’à travers un retour aux urnes”.
Jamais depuis 1958, la France n’avait connu une telle succession d’échecs politiques en si peu de temps : en à peine deux ans, trois gouvernements ont chuté, laissant le pays dans une impasse institutionnelle.
Des avantages qui font grincer des dents
Au-delà du tumulte politique, une autre polémique est venue envenimer la situation : celle des avantages octroyés aux membres du gouvernement Lecornu. Malgré la démission collective, chaque ministre touchera trois mois de salaire, soit environ 28 000 euros bruts, au titre de l’indemnité de fin de fonction.
Une décision jugée indécente par certains syndicats et élus d’opposition, alors que la crise économique et budgétaire s’aggrave. “C’est un scandale moral”, a dénoncé un député LFI, rappelant que “ces ministres n’ont même pas eu le temps de défendre un texte”.
Selon Bercy, les affaires courantes seront désormais assurées par Roland Lescure et Amélie de Montchalin, en attendant la formation d’un nouveau gouvernement. Le pays, lui, demeure suspendu à la décision d’Emmanuel Macron, qui doit trancher entre trois options : nommer un nouveau Premier ministre, dissoudre l’Assemblée, ou tenter un gouvernement d’union nationale.
En moins d’un mois, Sébastien Lecornu a incarné l’échec d’un équilibre politique impossible à trouver : concilier la continuité du macronisme et le besoin de renouvellement réclamé par l’opinion. Son départ précipité illustre l’essoufflement d’un quinquennat qui peine à se réinventer.