Dans une petite ville du Québec, l’admiration sincère d’un fan s’est muée en piège redoutable.

Un retraité de Shawinigan, convaincu de converser avec Lara Fabian, a vu sa vie basculer en quelques mois. Trompé par une fausse identité savamment construite, il a perdu toutes ses économies, emporté par une affection devenue vulnérabilité.

À l’automne 2023, Gérald Trahan reçoit sur les réseaux sociaux un message signé du nom de Lara Fabian. Pour cet admirateur de longue date, rien ne paraît suspect : il suit la chanteuse depuis 1994, année où il l’a rencontrée brièvement, et interagit régulièrement sur ses publications. Cette proximité virtuelle a facilité la manipulation, ouvrant la voie à un contact de plus en plus personnel avec l’imposteur.

Le glissement progressif vers la dépendance affective

Séduit par cette attention inattendue, Gérald accepte de poursuivre l’échange sur Telegram. Peu à peu, la frontière entre réalité et illusion se brouille. Il confie avoir ressenti « un coup de foudre », impression qui l’a poussé à accorder une confiance totale à son interlocutrice. C’est dans ce climat d’adhésion émotionnelle que les premières demandes d’argent apparaissent, présentées comme des urgences altruistes ou personnelles, destinées à renforcer l’illusion d’intimité.

Une avalanche de virements aux motifs toujours plus douteux

Les demandes se multiplient : 15 000 dollars pour des enfants d’un orphelinat parisien, 6 000 dollars pour un piano, puis des sommes bien plus élevées, parfois jusqu’à 150 000 dollars pour soi-disant financer un divorce et préparer une vie commune à Paris. Gérald accède à tout, persuadé qu’il aide la véritable artiste. L’arnaque s’installe dans la durée, exploitant sans relâche les sentiments du retraité.

L’entourage impuissant face à l’emprise psychologique

Au fil des mois, la famille et les amis tentent d’alerter Gérald Trahan. Sa nièce, Jacinte Gélinas, raconte combien il était difficile de l’amener à douter : il se fâchait, se coupait de ses proches, persuadé d’avoir trouvé un lien affectif unique. Pour lui, cette relation virtuelle était devenue un refuge, la seule chose qui illuminait son quotidien, malgré les mises en garde répétées de son entourage.

Un réveil brutal face à une ruine totale

Au printemps 2025, les premières interrogations apparaissent enfin. Sa nièce découvre l’ampleur de l’escroquerie : plus de 400 000 dollars canadiens, soit environ 245 000 euros, envolés. Gérald avoue tout avoir perdu : « Je suis ruiné complètement », dit-il, allant jusqu’à vendre sa maison pour couvrir ses dettes. Sa famille s’interroge désormais sur l’inaction des banques, incapables de stopper des virements suspects malgré leur fréquence et leurs montants inhabituels.