Arrogant, Eddy Mitchell assume sa fortune : « Beaucoup de gens vont pleurer »
Voix grave, costume sombre, regard goguenard : Eddy Mitchell incarne depuis plus de soixante ans une certaine idée du crooner à la française. Entre rock, cinéma et franc-parler assumé, l’interprète de “La Dernière séance” continue de fasciner, symbole d’une époque où la classe se mêlait à la gouaille et où les chanteurs avaient du panache.
Révélé dans les années 60 avec le groupe mythique Les Chaussettes Noires, Eddy Mitchell – de son vrai nom Claude Moine – s’impose rapidement comme l’un des pionniers du rock français. À la fois charmeur et désinvolte, il emprunte autant à Elvis Presley qu’à Chuck Berry, ses maîtres d’outre-Atlantique. Sa carrière solo décolle vite, portée par des titres devenus cultes comme La Dernière séance et Couleur menthe à l’eau. Des mélodies à la fois nostalgiques et sensuelles, teintées de spleen et de swing américain. Sur scène, il dégage une assurance naturelle, un mélange de charisme tranquille et de nonchalance virile, quelque part entre Sinatra et John Wayne.
Le cinéma, son autre passion
Amoureux du septième art depuis toujours, Eddy Mitchell ne s’est jamais contenté de le chanter : il l’a aussi incarné. Dès 1962, il passe de la scène au grand écran et collabore avec de grands réalisateurs. On se souvient notamment de sa performance dans À mort l’arbitre ! de Jean-Pierre Mocky, où il surprend par son intensité dramatique. Plus tard, il brille dans la comédie d’espionnage La Totale ! aux côtés de Thierry Lhermitte, un film qui inspirera Hollywood avec le remake True Lies signé James Cameron.
De 1982 à 1998, il devient aussi le visage incontournable de “La Dernière séance” sur FR3, émission hommage au cinéma américain des années 50. En costume, cigare à la main, il présentait chaque mardi soir deux films d’époque, dans une atmosphère rétro et feutrée. Pour des millions de téléspectateurs, cette émission fut un rendez-vous culte, où Eddy Mitchell célébrait son amour du grand écran avec élégance et nostalgie.
Un franc-parler sans filtre
Mais si Eddy Mitchell cultive le respect du public, il ne s’embarrasse guère de faux-semblants. Connus pour ses formules piquantes et ses sorties parfois provocatrices, il n’a jamais caché son goût du confort et de la réussite. Invité en 1992 dans l’émission Double Je de Thierry Ardisson, il répondait sans détour aux questions sur sa fortune. Quand l’animateur lui demande s’il a gagné beaucoup d’argent, il répond d’un ton amusé : « Ouais, et j’espère que ça va continuer, parce qu’on en a toujours besoin. »
Relancé sur ses dépenses, il admet : « L’argent, c’est fait pour être dépensé. J’y peux rien, j’ai pas inventé le système. » Et lorsque Ardisson s’étonne du montant colossal qu’il déclare pour “faire tourner la machine”, le chanteur, avec un brin d’arrogance assumée, conclut : “C’est dur, hein ? J’imagine qu’il y a beaucoup de gens qui vont pleurer.” Une réplique qui en dit long sur le personnage : provocateur, lucide et fier de sa réussite.