Zaz : « sans thune et à la rue », sans pudeur sur ses galères, « la méchanceté qu’il peut y avoir »
Avec sa voix éraillée et son énergie bouillonnante, Zaz — de son vrai nom Isabelle Geffroy — a conquis le cœur du public. Mais derrière les succès planétaires et les refrains entêtants se cache une femme au parcours rude, façonné par la précarité, les critiques acerbes et une volonté farouche de s’en sortir.
Invitée dans C à vous, la chanteuse de 45 ans s’est livrée sans détour sur les années d’ombre qui ont précédé la lumière. Bien avant d’écumer les plus grandes scènes du monde, Zaz chantait sur les trottoirs, avec pour seule scène les pavés et pour public les passants. Cette époque, elle ne l’efface pas, bien au contraire. “À un moment donné, la rue s’est imposée parce que je n’avais plus de thunes”, confie-t-elle avec une honnêteté désarmante. Loin d’être une posture bohème, chanter dans la rue était une nécessité, presque une urgence vitale. Mais aussi une étape fondatrice : “C’était un choix aussi. Je voulais chanter, je ne trouvais plus d’endroit, alors j’ai pris la rue.”
Cette période l’a construite, dans l’adversité comme dans la liberté. Zaz y a appris à capter l’attention sans micros ni projecteurs, à s’imposer par la seule force de sa musique et de sa sincérité.
Une célébrité difficile à encaisser
Lorsque la notoriété arrive, notamment avec Je veux en 2010, elle est aussi brutale que fulgurante. Si les ventes explosent et que les tournées s’enchaînent, les critiques, elles, pleuvent avec une violence inouïe. “C’était violent, la méchanceté. Des gens qui crachent leur venin derrière les écrans… Parce qu’en face, ils ne le feraient pas”, déplore-t-elle dans C à vous.
Cette hostilité numérique, Zaz ne l’a jamais vraiment comprise. Elle, l’artiste sincère, généreuse, ne se reconnaît pas dans les jugements tranchants, ni dans l’image parfois caricaturée qu’on lui renvoie. Mais elle ne s’est pas laissée écraser : “J’ai une rage de vivre, une force de résurrection incroyable.”
Une transformation personnelle assumée
Ces dernières années, Zaz a amorcé une profonde métamorphose. Elle a abandonné la cigarette, l’alcool, le café, la viande, s’est mariée et est devenue maman, recentrant sa vie autour de valeurs essentielles. Une transition qu’elle décrit comme une quête d’équilibre, de cohérence entre sa vie intime et ce qu’elle chante.
Ce chemin de transformation, elle le partage notamment à travers ses chansons. Dans Je pardonne, elle évoque le processus de libération intérieure : “Pardonner, ce n’est pas effacer. C’est se libérer, soi, de son histoire. C’est arrêter de la ressasser.” Une manière de tourner la page sans renier ce qui a été.
Une artiste habitée par la résilience
Zaz n’a jamais été une chanteuse formatée. Issue de la rue, passée par les bals, les orchestres, les scènes de fortune, elle incarne une trajectoire hors norme dans le paysage musical français. Si ses débuts furent chaotiques, c’est dans cette instabilité qu’elle a forgé sa liberté. “Avant la rue, j’étais intermittente, j’ai bossé partout. Mais la rue m’a appris à être moi, à toucher les gens sans fard.”
Aujourd’hui, elle continue d’écrire, de chanter, de guérir. Son histoire, loin des clichés de conte de fées, est celle d’une femme debout, qui a transformé la galère en force, et la musique en exutoire.