Manon Aubry, députée européenne : « Emmanuel Macron choisit de défendre les grands patrons plutôt que ceux qu’ils exploitent »
Dans une tribune engagée, Manon Aubry dénonce la volonté d’Emmanuel Macron de supprimer le devoir de vigilance des multinationales, qu’elle qualifie d’attaque frontale contre les droits humains et l’environnement.
Pour l’eurodéputée LFI, c’est un choix politique clair : défendre les intérêts des grandes entreprises au détriment des citoyens et de la planète. Lors du sommet Choose France, le 19 mai 2025, Emmanuel Macron a appelé à la suppression totale du devoir de vigilance des multinationales, une directive européenne adoptée après de longues années de lutte par les ONG, syndicats et certains élus. Ce texte visait à contraindre les grandes entreprises opérant en Europe à identifier, prévenir et réparer les atteintes aux droits humains ou à l’environnement dans l’ensemble de leur chaîne de valeur, qu’il s’agisse de sous-traitants au Bangladesh ou d’exploitations minières en Afrique.
Pour Manon Aubry, cette annonce est une régression majeure, un renoncement face à la pression des lobbies économiques. Elle dénonce une volonté politique assumée : mettre fin aux contraintes réglementaires pesant sur les entreprises au nom d’une compétitivité mal comprise, à courte vue et profondément injuste.
Une vision néolibérale qui fragilise l’Europe
La députée européenne rappelle que cette directive faisait figure d’exception dans un paysage européen de plus en plus tourné vers la dérégulation. « On veut nous faire croire que le progrès passe par moins de règles, moins de garde-fous, moins d’exigences sociales et écologiques », écrit-elle. Mais cette approche, selon elle, revient à livrer les populations et la planète à la loi du plus fort : celle des multinationales qui maximisent leurs profits en externalisant leurs dégâts.
Manon Aubry oppose à cette vision un autre projet pour l’Europe : celui d’un modèle fondé sur la justice sociale, la transparence, et le respect de l’humain et du vivant. Elle cite en exemple les scandales impliquant Shein, Lactalis ou encore Nike, entreprises régulièrement pointées du doigt pour leurs pratiques déloyales. Avec un devoir de vigilance renforcé, ces structures pourraient être tenues responsables devant la justice – une avancée que le chef de l’État semble vouloir enterrer.
La France, complice des reculs ?
En attaquant de front un texte adopté à l’échelle européenne, la France envoie un signal de défiance à ses partenaires, alerte l’élue. Elle accuse Emmanuel Macron d’affaiblir l’ambition collective au moment où d’autres puissances, comme les États-Unis ou la Chine, tentent de s’imposer comme normes mondiales alternatives. « Renoncer à nos exigences, c’est aussi renoncer à notre souveraineté morale », martèle-t-elle.
Elle fustige aussi le double discours de l’exécutif, qui prétend défendre l’environnement et les droits sociaux, tout en cédant aux sirènes des intérêts économiques à court terme. « Comment expliquer aux citoyens qu’on se mobilise pour le climat à la COP tout en offrant des passes-droit à Total, Bayer ou Amazon ? », interroge-t-elle.
Une mobilisation citoyenne plus nécessaire que jamais
Pour Manon Aubry, il ne s’agit pas simplement d’une divergence idéologique, mais d’un choix de société : celui entre un capitalisme dérégulé où les plus puissants dictent leur loi, et un système fondé sur des règles communes protectrices. Elle appelle donc à la mobilisation de la société civile, des syndicats, des juristes, des ONG et des citoyens, afin de faire pression sur les institutions européennes pour défendre et renforcer le devoir de vigilance.
« Ce n’est pas seulement un texte qu’on défend, c’est notre avenir collectif. Il est encore temps de faire barrage à cette trahison silencieuse », conclut-elle.