Le ministère de l’Agriculture coupe (drastiquement) dans les budgets de l’Agence Bio
Alors que l’agriculture biologique subit déjà de plein fouet la chute de la consommation et le poids de l’inflation, un nouveau coup dur vient fragiliser encore davantage le secteur.
En 2025, l’État supprime une partie majeure des financements destinés à l’Agence Bio. Une décision vécue comme un abandon, voire une trahison. Le ministère de l’Agriculture a tranché : 15 millions d’euros alloués à l’Agence Bio seront supprimés dès 2025. Cette enveloppe comprenait notamment 5 millions consacrés à une campagne de communication ambitieuse, ainsi que 10 millions qui devaient soutenir des projets agricoles. Cette coupe budgétaire s’inscrit dans un contexte plus large de réduction des dépenses publiques, mais elle vise directement un secteur déjà en difficulté. L’entourage de la ministre Annie Genevard évoque des arbitrages « en concertation avec les professionnels », sans pour autant convaincre les acteurs du bio.
Une structure en alerte rouge
L’Agence Bio, pilier historique de la filière, tire la sonnette d’alarme. Elle dénonce un « recul historique » de ses moyens, évalué à 64 % de perte budgétaire en un an. Pour sa direction, ces coupes mettent à mal les ambitions affichées par l’État en matière de transition écologique. « C’est un secteur essentiel […] qui est abandonné, à rebours de l’Histoire », s’indigne-t-elle dans un communiqué. Sans ressources suffisantes, la structure redoute de ne plus pouvoir assurer ses missions de promotion ni de développement du bio sur le territoire.
Une décision sous le feu des critiques
Les réactions politiques n’ont pas tardé. À gauche, les voix s’élèvent pour dénoncer un choix jugé incohérent. « Une erreur historique », tranche la députée Aurélie Trouvé (LFI). David Cormand, eurodéputé écologiste, fustige un « non-sens politique », rappelant que les bénéfices du bio, tant sanitaires qu’écologiques, sont largement documentés. Selon lui, sabrer l’Agence Bio revient à saboter les engagements climatiques de la France et à mépriser les 60 000 fermes engagées dans cette voie.
Une campagne annulée à la veille de son lancement
Parmi les projets sacrifiés, une grande opération de communication intitulée « C’est bio la France ». Prévue pour être lancée dans deux jours à l’occasion des 40 ans du label bio, la campagne visait à relancer la consommation, actuellement en berne. Mais sans budget, elle ne verra pas le jour. Ce revirement brutal suscite l’incompréhension, d’autant que la filière souffre déjà de la baisse du pouvoir d’achat des Français, qui se tournent vers des produits moins coûteux.
Une polémique en arrière-plan
Cette décision intervient également dans un contexte polémique. Récemment, Libération révélait que le ministère avait demandé des modifications surprenantes dans le contenu du spot publicitaire du bio : remplacement du couscous par du cassoulet, et demande explicite d’un casting « caucasien ». Des révélations qui ont semé le malaise. Si la ministre n’a jamais démenti, elle s’est contentée d’évoquer une volonté de « parler à tous les Français ». Une explication qui laisse un goût amer.
L’ombre d’une politique austéritaire
Cette orientation s’inscrit dans une dynamique plus large, celle d’un recul de l’État sur ses missions environnementales. Dès 2017, Emmanuel Macron supprimait déjà l’aide au maintien pour l’agriculture bio. L’année dernière, lors du Salon de l’Agriculture, il n’avait même pas pris le temps de visiter le stand de l’Agence Bio, malgré une présence de treize heures sur place. Pour les professionnels, le signal est clair : la filière n’est pas une priorité présidentielle.