“Gna gna gna” : Marine Le Pen à bout face à Thomas Sotto, elle le rembarre sèchement
Un simple café qui fait couler beaucoup d’encre. La rencontre entre Nicolas Sarkozy et Jordan Bardella continue d’agiter la sphère politique, alimentant les spéculations, les crispations et les interprétations.
Invitée à réagir, Marine Le Pen a défendu la démarche de son successeur au Rassemblement national, tout en maintenant ses critiques passées à l’égard de l’ancien président. L’occasion pour elle de rappeler sa ligne : respect institutionnel, mais fermeté idéologique.
Interrogée ce jeudi 3 juillet sur RTL par Thomas Sotto, Marine Le Pen a pris soin de déminer le terrain, tout en refusant de renier ses positions passées. Oui, Jordan Bardella a rencontré Nicolas Sarkozy. Oui, cette rencontre s’inscrit selon elle dans une logique « républicaine et institutionnelle ». Et non, elle ne voit pas de faute dans cette initiative, estimant qu’il est « naturel pour le président du premier parti de France de s’entretenir avec un ancien président de la République ».
Mais l’essentiel de son discours vise à rassurer sa base électorale. Celle qui n’a jamais mâché ses mots contre l’ex-chef d’État l’assume pleinement : « Je ne change pas d’avis sur la politique menée par Nicolas Sarkozy, que je considère comme délétère. » Elle balaie d’un revers de main les tentatives de déstabilisation autour de ce « rapprochement » apparent, en rappelant que Sarkozy est désormais hors-jeu politiquement : « Il ne fait plus de politique. »
Une posture d’ouverture… encadrée
Marine Le Pen se montre habilement pragmatique. Si elle avait été conviée à un rendez-vous similaire, dit-elle, elle aurait accepté « par principe », car elle répond toujours « positivement aux invitations de ses adversaires politiques ». Mais ce respect protocolaire ne vaut pas bénédiction politique.
En renvoyant Nicolas Sarkozy à son statut d’ancien président, elle neutralise le risque de brouiller son discours idéologique, tout en validant implicitement la stratégie d’élargissement amorcée par Jordan Bardella. Elle dessine ainsi une frontière : le dialogue institutionnel est permis, l’oubli politique, exclu.
Un échange tendu avec Thomas Sotto
Mais l’interview a également révélé une certaine nervosité. Lorsque Thomas Sotto lui rappelle les propos virulents qu’elle avait tenus à l’encontre de Nicolas Sarkozy – « président des riches », « promoteur du communautarisme » – Marine Le Pen hausse le ton. Elle s’agace : « Monsieur Sotto, coucou, il n’est plus en politique. »
La tension monte encore d’un cran lorsque le journaliste évoque la Légion d’honneur retirée à Nicolas Sarkozy, à la suite de ses condamnations judiciaires. Exaspérée, la députée RN balaie la question d’un méprisant : « Ces gna gna gna, ça ne m’intéresse pas. » Elle recentre le débat sur le mandat présidentiel, qu’elle considère intangible.
Du côté du gouvernement, Darmanin s’en mêle
Gérald Darmanin, fidèle parmi les fidèles de Nicolas Sarkozy, a lui aussi été interrogé sur cette entrevue discrète. Sur le plateau de C à vous, face à Pierre Lescure, le ministre de l’Intérieur s’est montré plus évasif. Il insiste sur le caractère privé de la rencontre : « une discussion sur les relations humaines ».
Mais lorsque le journaliste insiste sur la dimension politique, Darmanin répond avec une ironie contenue : « Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? » Tout en rappelant qu’il lui arrive lui-même de recevoir des élus de tous bords, il tient à affirmer que Nicolas Sarkozy est resté constant dans son opposition au RN.
Une séquence révélatrice des nouvelles lignes de fracture
Cette séquence politique apparemment anodine révèle pourtant un changement de ton subtil mais réel. La dédiabolisation du RN passe aujourd’hui par des gestes symboliques, comme celui de Jordan Bardella franchissant le seuil des bureaux d’un ancien président honni par son camp.
Marine Le Pen, elle, veille à ne pas perdre sa crédibilité auprès d’un électorat attaché à la rupture avec « l’ancien monde ». En acceptant l’idée de la rencontre tout en réaffirmant ses critiques, elle tente de tenir l’équilibre délicat entre ouverture tactique et fidélité doctrinale.
Le message est clair : le RN parle désormais à tout le monde… mais ne pactise avec personne. Une posture de pouvoir en devenir, soigneusement millimétrée à l’heure où les ambitions présidentielles de 2027 se précisent dans les coulisses.