Des signalements sur les patrimoines de Rachida Dati et d’Éric Lombard transmis au parquet de Paris
Un parfum de scandale plane à nouveau sur les déclarations de patrimoine au sommet de l’État. Après plusieurs révélations dans la presse, la transparence financière de deux membres du gouvernement est remise en question. La ministre de la Culture, Rachida Dati, est au cœur des accusations.
Le parquet de Paris a été saisi de trois signalements distincts ce lundi, concernant des soupçons de minoration de patrimoine visant Rachida Dati, ministre de la Culture, et Éric Lombard, ministre de l’Économie. Ces alertes, relayées par Libération, s’appuient sur des révélations de presse déjà connues mais jugées suffisamment graves pour justifier une transmission formelle à la justice.
Le premier signalement émane de Raymond Avrillier, militant écologiste bien connu pour ses engagements contre la corruption. Dans une lettre datée du 18 juin, il reprend notamment des informations publiées par Libération en avril dernier, évoquant l’omission de 19 bijoux d’une valeur totale de 420 000 euros par Rachida Dati dans sa déclaration à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Ces pièces de joaillerie seraient détenues depuis 2017.
Une défense ferme, mais des zones d’ombre persistantes
Rachida Dati avait assuré, début mai, « n’avoir rien à régulariser », rejetant toute irrégularité. Ni son avocat ni le ministère de la Culture n’ont souhaité réagir aux sollicitations de l’AFP à ce sujet. Mais le silence ne suffit pas à calmer les critiques, d’autant plus que les soupçons s’accumulent.
En parallèle, le sénateur socialiste Rémi Féraud, opposant à Dati au Conseil de Paris, a lui aussi déposé deux signalements auprès du parquet le 26 juin. Le premier confirme les soupçons sur les bijoux non déclarés. Le second va plus loin en évoquant des « honoraires occultes » perçus par la ministre lorsqu’elle était eurodéputée.
Selon une enquête conjointe de L’Obs et de l’émission Complément d’enquête, Rachida Dati aurait touché 299 000 euros d’honoraires de GDF Suez entre 2010 et 2011, sans en faire état auprès du Parlement européen ni de la HATVP. Des faits potentiellement lourds, si leur véracité était confirmée.
Le cas Éric Lombard : minoration ou simple décote ?
Le ministre de l’Économie, Éric Lombard, est également visé par les signalements. En cause : la possible sous-évaluation de son patrimoine immobilier, notamment la valeur d’une maison dans le Morbihan et celle d’un appartement. Le Canard enchaîné a révélé que les montants déclarés à la HATVP divergeaient sensiblement de ceux inscrits au cadastre ou transmis à l’administration fiscale.
L’équipe de Lombard a répliqué en expliquant que le ministre ne détient qu’une quote-part de ces biens et que l’usufruit exercé sur la propriété justifierait une décote, une pratique tolérée en droit patrimonial. Contacté, le ministère n’a pas souhaité commenter davantage.
Une séquence politique délicate
Ce nouvel épisode fragilise un peu plus la crédibilité de l’exécutif dans sa volonté affichée de transparence. Les accusations visant Rachida Dati interviennent alors qu’elle essuie déjà des critiques pour son projet de réforme de l’audiovisuel public, récemment rejeté à l’Assemblée. La ministre, figure incontournable de la droite parisienne, se retrouve donc dans une posture délicate à l’approche des municipales de 2026, où elle pourrait retrouver sur sa route le socialiste Emmanuel Grégoire.
De son côté, le parquet de Paris n’a pas encore réagi officiellement. Mais si une enquête préliminaire était ouverte, elle pourrait aboutir à une demande de levée d’immunité ou à une instruction pénale en cas d’éléments probants.